Je danserai si je veux
Leïla et Salma sont des Arabes Israéliennes de Tel-Aviv. “Libérées”, elles passent leur soirées à danser, boire et fumer, dans une insouciance déconcertante. Nour, jeune étudiante venant du très conservateur village de Oum Al-Fahem débarque dans leur vie, en partageant leur colocation. Nour, musulmane très pratiquante parait plus “coincée” et traditionnelle que ses deux voisines.
Pourquoi tous ces guillemets ? Parce que le film joue de cet antagonisme entre tradition et modernité, entre enfermement et liberté, mais pour moi, le vrai propos du film va au delà de ça.
Oui, “Je danserai si je veux” est un film dérangeant, provocant. Néanmoins, dérange-t-il à cause des tabous qu’il aborde (alcool, drogue, sexe) et de la soi-disant opposition modernité / conservatisme ou ce qu’il dénonce va-t-il plus loin ?
Ce film a valu à la réalisatrice Maysaloun Hamoud de sérieuses menaces de mort, ainsi qu’aux actrices, et une interdiction de projection dans certaines villes, notamment Oum Al Fahem. Le film est cru, effectivement choquant, mais exprime finalement très bien la difficulté à trouver un équilibre quand on est une femme, arabe israélienne, et qu’on souhaite être indépendante, en allant d’un extrême à un autre. Le bonheur doit il forcément passer par la liberté de tout faire sans contrainte ? La question peut paraître choquante mais il est évident qu’aucune des femmes n’est pleinement heureuse dans leurs modes de vie, aussi différents soient ils. La traduction française du titre est comme souvent complètement à coté de la plaque et met en avant une espèce de fausse rébellion par les sorties nocturnes, alors que le titre original Bar Bahar (Entre terre et mer) met surtout en lumière une impossibilité de trouver sa place dans une société en pleine mutation où effectivement la transition est violente, surtout pour les femmes. Maysaloun Hamoud s’est fait d’ailleurs tatoué sur le bras le titre original de son film, comme pour ne pas oublier à quel point il est difficile d’exister.
Ceux qui ne voient dans ce film qu’une critique du conservatisme religieux et/ou une ode à la débauche n’ont rien compris.
Maysaloun Hamoud a voulu montrer ce qui reste caché, à savoir la réalité d’une certaine jeunesse à Tel Aviv, loin de la guerre de territoire, Les arabes israéliens et les juifs se côtoient dans le cadre professionnel et encore, mais sans plus. Chacun vit de son coté. La violence raciale est abordée de manière très subtile mais est assez présente.
Finalement le vrai problème de ces femmes, Leila, Salma, et Nour, ce n’est pas la religion en elle-même mais bien le patriarcat, et les hommes. Chacune a des aspirations, des rêves qui sont entravés par un homme, les plus permissifs, comme les plus conservateurs. Sans trop en dire, le seul personnage masculin à être digne, et décent est le père de Nour, qui vous arrache quelques larmes de soulagement. Finalement leur condition de femmes va les réunir au delà de leurs modes de vie supposément si différents.
Les 3 actrices (Mouna Hawa, Shaden Kanboura, et Sana Jammelieh) sont époustouflantes de justesse, sublimes et portent complètement le film. L’autre point fort du long métrage, c’est la bande son, superbe, qui illustre et rythme parfaitement le film.
Je ne vous mets volontairement pas la bande annonce, car je trouve qu’elle en montre trop, en revanche cette vidéo avec la chanson titre et quelques extraits devraient vous donner envie !
Je danserai si je veux (Bar Bahar)
de Maysaloun Hamoud
en salles en France depuis le 12 avril 2017
[…] le contraire. C’est pour ça que je n’étais pas du tout fan du film sorti récemment « Je danserai si je veux”. Pour avoir côtoyé des femmes de toutes les classes sociales, je n’ai jamais vu ça de […]