Caroline Wanga est à la tête du magazine Essence. Cette femme de pouvoir s’est construite toute seule, grâce à un mental hors du commun. Sa philosophie est une vraie force motrice au service des siens. Portrait.
Il suffit d’écouter une interview de cette femme pour remettre en question toute sa vie. Elle a une élégance naturelle, irradiant d’un charisme flamboyant et une voix particulière. Tous ces ingrédients suffisent à développer une addiction à la grande Caroline Wanga. Architecte culturelle autoproclamée, passionnée par la construction, la déconstruction et la reconstruction de la culture organisationnelle, Caroline Wanga est une femme hors normes.
« Soyez connecté avec une belle énergie, soyez avec une personne qui va vous donner envie de vous tenir droite et avancer ! Ne rejetez pas le soutien d’où il vient. Restez avec les personnes qui vous font vous sentir bien et valorisent votre personnalité ! »
Caroline Wanga naît à Kisumu ville portuaire au Kenya, voici 43 ans. Fille d’enseignants universitaires, elle est ultra consciente qu’elle a bénéficié d’un environnement qui a favorisé l’excellence universitaire et le plus grand respect de la condition humaine. Ses parents lui ont surtout forgé cette conviction qu’elle pouvait faire tout ce qu’elle voulait. Elle a été élevée dans l’enceinte de l’université Kenyatta, où ses parents, Pamela Obondi-Wanga et Lucas Wanga étaient des chercheurs. Sa famille a ensuite déménagé aux États-Unis en 1988 pour rejoindre son père, qui étudiait à l’université du Minnesota pour obtenir un doctorat en psychologie de l’éducation.
« La seule personne qui doit être votre rôle modèle, c’est vous ! Vous ne serez jamais seul avec vous-même. »
A 17 ans, elle devient mère et abandonne alors l’idée d’entamer des études universitaires. La naissance de sa fille est comme une première expérience professionnelle de la vie, pour la jeune femme.
« Il a fallu prendre des décisions importantes, rapidement et prendre soin d’un être humain qui dépendait entièrement de moi ! » Radio 97 .
Elle travaille alors pour une colonie de vacances pour jeunes enfants/adolescents pendant 7 ans et c’est là qu’elle apprend à développer des projets et gérer des êtres humains. Devenir mère si jeune a endurci sa personnalité, lui a insufflé une ardeur et un esprit de gagnante, mais elle comprend très tôt que pour apprendre à gagner, il faut apprendre à perdre. En grandissant, elle a eu de nombreuses aspirations : pasteur, médecin, athlète, ou encore policière ou enseignante. Mais c’est vers une autre voie qu’elle se destine. Elle entame des cours de commerce à l’HBCU Texas, qu’elle a suivi avec beaucoup de colère, car les gens autour d’elle lui demandaient tous les jours comment elle arrivait à être étudiante et maman.
Elle a commencé sa carrière comme stagiaire non payée, dans différentes entreprises et s’est finalement hissée cheffe des ressources humaines du groupe Target, durant 1 an et 5 mois. Puis, avec une nouvelle promotion, elle a accédé au poste de gestionnaire principale de groupe, avant de devenir la directrice « diversité et inclusion ». Son enthousiasme et sa volonté ne connaissent pas de limites, et sa façon de parler ne laisse personne indifférent. Un jour, un certain Rich Lou Dennis lui propose de collaborer sur l’iconique magazine « Essence » créé par feu Gordon Parks, photographe reporter américain. Essence est une entreprise médiatique détenue par des personnes noires qui vise à renforcer et à amplifier les besoins de la communauté dans tous les domaines, y compris le divertissement, la beauté et la culture.
« Beaucoup de gens lisent des livres sur la transformation de vie, moi je la vis ! » Radio 97 Juin 22
L’aventure Essence commence alors. « Devenir mère adolescente à 17 ans n’est pas un évènement que l’on célèbre. Mon entourage et la société commençaient à renégocier mon potentiel sans ma permission ! Le monde commençait à me dicter d’autres alternatives. Pour avoir du « succès », j’entendais tu devrais faire ci ou ça, c’était bienveillant, mais ce n’était pas moi.. J’ai passé ma vie à vivre pour ma fille Cadence, il y avait une dissonance en moi. Il fallait que je sois moi. J’ai commencé par brûler mes cardigans et m’habiller comme je le sentais. J’ai posé la couleur bleu sur mes lèvres. J’étais moi, ma façon de vivre et d’être n’était plus une menace dans ma vie professionnelle. L’authenticité allait devenir mon travail à plein temps » Radio 97 juin 22
Caroline ouvre le chapitre Essence en revendiquant sa personnalité et en clamant son intelligence ! Car les femmes non blanches doivent souvent diminuer voir éteindre leurs brillance pour ne pas intimider l’entourage pétri par la norme. Elle comprend que lorsqu’on vit sa propre réalité, d’autres regards se posent sur votre personnalité et donc d’autres opportunités s’ouvrent à vous, comme si tout était aligné. Lorsqu’elle débute sa carrière chez Essence, le groupe médiatique est dans la tourmente. En effet, Essence a été ébranlé par des allégations d’abus sur le lieu de travail en 2020, ce qui a incité la direction à apporter des changements hiérarchiques.
C’est ainsi que Caroline a été nommée PDG par intérim de la marque. Elle s’était présentée comme quelqu’un qui aime travailler dans des environnements difficiles et qui sait gérer des personnalités pour atteindre des objectifs. Trois ans plus tard, Caroline propulse ce magazine vers les hautes sphères du succès. Elle développe le festival Essence fest dans dans tout le pays et organise de brillantes conférences. Ces dernières sont calquées sur le format Davos qu’elle a surnommé « Blabos » parce que les personnes noires ont enrichi de nombreux aspects de la culture et du monde.
On pourrait croire qu’elle a travaillé dans les médias toute sa vie alors que cette jeune femme a commencé dans une colonie de vacances en étant mère adolescente.
« Les personnes blanches sont bienvenues à nos célébrations, mais nous n’allons pas nous adapter à elles pour leur rendre cette expérience plus confortable. C’est un festival pour/par les personnes noires » Radio 97, juin 2022.
Caroline Wanga met le soutien des femmes noires au dessus de tout. Pour elle, n’importe quel être humain devrait voir au moins une fois dans sa vie Janet Jackson, mais aussi soutenir Nicki Minaj qui a apporté une autre forme d’énergie dans le monde de la musique. Quand elle parle des femmes noires, c’est toujours une masterclass. Dans une vidéo Tiktok, Caroline Wanga pensent sincèrement que les femmes noires doivent être les PDG de leurs vies, elles ne doivent pas juste être de simples exécutantes et remplir de simples tâches. Elles sont dans l’obligation de continuer à travailler car c’est dans leur ADN. Reprendre le pouvoir dans leurs vies va leur donner un capital temps, social, et financier. Ces capitaux vont récompenser ce labeur et si on ne rééquilibre pas ces inégalités, ces efforts seront futiles et cette énergie ne sera pas rechargée pour continuer.
“Il n’existe pas un jour sans les que les femmes noires ne se lèvent pas et ne travaillent pas, car sans nous le monde s’écroule. »
Caroline Wanga a cette assurance qu’ont les personnes brillantes. Elle est consciente de sa valeur et n’a aucun problème à se présenter publiquement comme une femme très intelligente. L’ université du Texas ainsi que l’Université de Dillard lui ont attribué un doctorat honorifique. Elle a déjà été nommée Top Executive in Corporate Diversity par le magazine Black Enterprise et reconnue par Savoy comme l’une des femmes les plus puissantes des entreprises américaines. Elle est membre de l’Executive Leadership Council (ELC), du American Airlines Community Council et du Multicultural Marketing Advisory Council de McDonald’s.
Ses parents avaient raison. Caroline Wanga peut tout faire, à commencer par changer nos croyances limitantes.
“I have a saying I say all the time that I live by which is ‘who you are is where you are. If you can’t be who you are you change where you are.”