Depuis le 7 mars dernier et jusqu’au 30 juillet 2017, l’Institut des cultures d’Islam propose un cycle composé d’une exposition et de différents événements culturels (projection de films, concerts, soirées,débats, etc) intitulé de manière culottée « Rock the Kasbah ». Le clin d’oeil au morceau des Clash, repris entre autres par Rachid Taha est bien entendu évident, et donne une bonne idée de ce que ce cycle représente : une explosion d’oeuvres photographiques, visuelles, sonores par des artistes engagés venant de pays musulmans, de l’Afrique sub-saharienne à l’Asie du Sud Est, en passant par le Maghreb, entre autres.
La musique est au centre de cette exposition et de ce cycle, en mettant en avait plusieurs modes de diffusion sonore, ainsi que plusieurs supports. L’expérience est complétée par l’exploitation de lieux complètement improbables de l’Institut, comme le hammam, le restaurant, etc..
Le 7 mars dernier, c’était le vernissage de cette exposition qui promettait de nous faire secouer au minimum la tête.. Rock The Kasbah veut explorer les effets de la musique et des sons sur les corps, les âmes. Et c’est réussi !
D’entrée on est happés par un écran géant et ces corps et chevelures féminins qui se balancent au ralenti et en silence (voir affiche). Angelica Mesiti nous montre 4 femmes qui semblent être en transe, entre danse rituelle et mouvements de tête digne des plus beaux clips de métal ! Le corps en mouvement est également au centre du travail photographique de Siaka Soppo Traoré. De magnifiques photo de breakeurs, littéralement en suspension dans l’air, dans les rues de Dakar ornent la salle du rez de chaussée, ainsi qu’au 2è étage de l’Institut.
Continuons la visite de l’exposition au niveau du 2è étage de l’Institut, justement. Dans une des salles, une véritable expérimentation sonore créée par Magdi Mostafa nous emmène directement dans les rues du Caire. L’installation en place nous plonge dans les bruits des quartiers populaires de cette ville. Des bruits de circulation, de prêche, de machines à laver sortent de chacun de ces tonneaux. Voyage immédiat garanti !
Vous pourrez aussi voir une vidéo de Hiwa K, sur un soulèvement populaire au Kurdistan Irakien, avec pour seul accompagnement sonore de ce mouvement de contestation, de l’harmonica, ainsi qu’une vidéo du jeune chanteur Mohammed Lamourie, bien connu des usagers du métro parisien, en particulier de la ligne 2, reprenant « Hotel California ».
Descendons maintenant au sous-sol, où se trouve normalement le hammam, qui a été aménagé en lieu de projections visuelles et sonores.
Déchaussez vous et entrez sur le magnifique tapis qui orne la première salle. à, entre 4 enceintes, vous pourrez percevoir les psalmodies soufies enregistrées par James Webb, en Afrique du Sud. Pas de musique ici, mais des voix, comme instrument, au service de la spiritualité. Dans les deux autres salles du hammam, 2 vidéos d’Adel Abidin sont projetées, dans deux styles différents. La première, « Bread of life« , montre des musiciens du Caire, faisant des percussions sur du pain, transformé en darbouka, dans un contexte qui peut rappeler une situation de guerre, ou de famine. La deuxième, « Michael », met en scène le King of Pop, de manière assez particulière, quasi prophétique, je ne vous en dit pas plus !
L’institut des cultures d’islam se compose de 2 lieux. Le lieu principal, rue Stephenson, propose les oeuvres dont je viens de vous parler. Mais l’exposition ne s’arrête pas là. Le deuxième lieu, rue Léon (dans le même quartier, celui de la goutte d’or, dans le 18e arrondissement de Paris), accueille le restaurant de l’institut et également la suite de l’exposition.
On retrouve à nouveau des vidéos d’Adel Abidin, qui nous montre dans « Three love songs » 3 versions de la même chanteuse blonde, à l’air Occidental, reprenant de vieilles chansons Irakiennes, à la gloire de Saddam Hussein. Véritables outils de propagande, ces chansons sont interprétées en dialecte Irakien par une chanteuse qui semble ne pas comprendre la dureté des paroles (disponibles en traductions à côté des installations), le tout dans 3 « ambiances » musicales différentes. Le contraste est frappant.
Ensuite Katia Kameli nous emporte entre Oran et Barbès,pour retracer l’histoire de ce quartier, le tout en vidéos et en musique, raï, bien sûr. Beaucoup de poésie et de mélancolie dans cette installation, avec aux murs des anciennes cassettes de cheb et chebbas mythiques.
L’installation de Jompet Kuswidananto est certainement l’une des plus impressionnantes et intrigantes. « The Contingent est un ensemble de silhouettes de musiciens fantômes, qui nous vient tout droit d’Indonésie. On s’attend quasiment à les voir prendre vie sous nos yeux, surtout quand les percussions se mettent à jouer toutes seules..
Même le restaurant / salon de thé sert de lieu culturel, à l’occasion de ce cycle « Rock the Kasbah ». L’ICI a en effet demandé à l’artiste Sara Ouhaddou de transformer l’établissement pour en faire un rappel des cafés typiques de Barbès des années 70.
La soirée de vernissage s’est terminée par un concert, celui du groupe Al Akhareen, qui reviendra en concert à l’ICI, le 1er weekend de juillet, avec d’autres groupes, dans le cadre d’un « Week-end Hip Hop the Kasbah!« , à ne pas manquer. Ce groupe est composé d’un rappeur Palestinien, d’une flûtiste Franco-Syrienne,et d’un DJ (absent ce soir là). Mêlant chants, rap, et beatbox, Al Akhareen propose un hip hop envoûtant et percutant.
Le cycle « Rock the Kasbah » vous invitera jusqu’en juillet à découvrir plusieurs autres événements, comme de nombreuses projections de films et documentaires, ainsi que des débats. N’hésitez pas à consulter leur programme, pour ne rien rater !
Institut des cultures d’Islam
- ICI Goutte d’Or : 56, rue Stephenson – 75018 Paris
- ICI Léon : 19, rue Léon – 75018 Paris