On revient juste avant Noël pour vous recommander nos coups de coeur littéraires depuis cet été. Les retardataires des cadeaux, ceux qui n’ont jamais d’idées, cet article est pour vous !
Au programme de cette recommandation littéraire de fin d’année, des récits de soi, de la transmission de l’histoire, de la BD, et de la musique. Kaoutar Harchi, Nadia Henni-Moulaï, Mehdi Charef, Rakidd et Karim Hammou & Cara Zina sont au rendez-vous ! On vous en parle tout de suite !
Kaoutar Harchi : Comme nous existons (Actes-Sud)
Dans un récit semi autobiographique, la sociologue Kaoutar Harchi raconte avec une plume élégante son enfance dans l’est de la France, avec ses parents, immigrés marocains à qui elle voue une admiration sans faille. Sans aucune forme de rupture familiale, elle s’approprie l’histoire de ses parents pour se raconter, raconter son existence, sa conscientisation politique par le racisme qu’elle et ceux qui lui ressemblent subissent. Dans ce livre, Kaoutar Harchi prend le parti de parler du point de vue du »Je », du « Nous », mais à ses/nos conditions. Raconter les difficultés que la société raciale française nous fait subir, mais aussi la beauté de ces vies. Parler de nous avec amour, et force. Il y a tout ça et encore plus dans ce bijou littéraire sorti cet été, aux éditions Actes-Sud.
Nadia Henni-Moulaï : Un rêve, deux rives (Éditions Slatkine & Cie)
Dans ce récit, lui aussi autobiographique, la journaliste et auteure Nadia Henni-Moulaï mène une sorte d’enquête sur son père, immigré algérien taiseux et dur. Quel homme se cache derrière son père ? C’est la question qu’elle s’est posée et à laquelle elle tente de répondre avec beaucoup de douceur. À travers l’histoire de son père, ancien du FLN, Nadia Henni-Moulaï raconte une partie de l’histoire de la guerre d’Algérie, sur l’autre rive de la Méditerranée. Quel rôle a-t-il joué dans cette guerre d’indépendance ? L’auteure prend le parti pris de raconter ce récit du point de vue de la petite fille qu’elle était, puis de l’adulte qu’elle est devenue. Navigant naturellement entre ces deux rives, entre la France et l’Algérie, Nadia Henni-Moulaï rend compte de cette hybridité qu’elle se réapproprie dans ce récit. La vie de son père Ahmed, se mêle à la sienne avec beaucoup de justesse.
Mehdi Charef : La cité de mon père (Éditions Hors d’atteinte)
La cité de mon père est le volet final de la trilogie autobiographique initiée par l’auteur et réalisateur Mehdi Charef, après Rue des pâquerettes en 2018 et Vivants en 2020. Après la vie en bidon-villes, puis celle en cité de transit, place au vrai logement, l’appartement en HLM. Avec la douceur et l’amour dont il fait preuve dans ses oeuvres, Mehdi Charef rend un vibrant hommage final à son père, lui qui a combattu la honte pour pouvoir offrir ce logement à sa famille venue d’Algérie. Dans cet opus, le jeune protagoniste, Ahmed est un jeune homme qui commence à travailler, écouter du rock et s’intéresser aux filles. Cet opus est encore plus touchant et émouvant que les deux premiers tomes, déjà très bons. Entre les souvenirs racontés à sa petite soeur morte en Algérie et sa réflexion sur sa condition de jeune immigré en France, Mehdi Charef, véritable pionnier de la littérature de l’immigration vise juste avec La cité de mon père. Un classique.
Rakidd (Rachid Sguini) : Le petit manuel antiraciste pour les enfants (mais pas que) (Éditions Lapin)
L’illustrateur Rakidd revient avec un guide pratique qui explique le racisme et comment le combattre, destiné aux enfants mais aussi aux plus grands. Avec son trait faussement enfantin mais qui appuie là où ça fait mal, l’air de rien, Rakidd propose une vision très pédagogique du militantisme pour déconstruire de nombreux termes et situations du quotidien. Qu’est-ce que le racisme ? La xénophobie ? Pourquoi faut-il dire « noir » et pas « black » ? Qu’est ce que l’islamophobie ? Qu’est ce que le racisme anti-asiatique, anti-Rroms ? Ce n’est bien sûr pas exhaustif mais ce petit manuel est un bon moyen d’éclaircir les esprits sur ces questions.
Karim Hammou et Cara Zina : Fear of a female planet (Nada éditions)
Le sociologue, spécialiste du rap, Karim Hammou découvre lors de recherches le groupe punk/rap féminin « Straight Royeur ». L’une des membres de ce groupe n’est autre que l’autrice Virginies Despentes. Il part à la découverte de ce groupe et de son oeuvre, notamment à travers une cassette intitulée Fear of a female planet. Qui sont donc ces rappeuses féministes qui s’inspirent du rap afroaméricain pour lutter contre le sexisme ambiant ? Il rencontre Cara Zina, autre membre du groupe qui l’aide dans son enquête. Un beau livre écrit à 4 mains, entre enquête et archive musicale, sociologique, une épopée de la scène punk et rap lyonnaise des années 80. C’est passionnant.