Samia Gamal est une légende de la danse, et du cinéma égyptien, voire du monde arabe. Son parcours est digne d’un scénario de film entre drame, et comédie musicale. Sa carrière si prolifique fut également marquée par son histoire d’amour avec le grand Farid El Atrache. Leur relation amoureuse, bien que de courte durée, a façonné l’image du glamour égyptien des années 50.
Si une femme a eu le pouvoir de visualisation, c’est bien Samia Gamal. Née Zainab Ibrahim Mahfuz, le 5 mars 1924 dans le petit village de Wana, en Égypte, cette femme n’a pas rêvé sa vie, mais a bien vécu ses rêves. Avant de devenir Samia Gamal, la grande danseuse égyptienne au succès international, la jeune Zainab Ibrahim Mahfuz vivait une extrême pauvreté dans la campagne de haute Egypte. Son père était ouvrier agricole, et l’argent ne rentrait pas régulièrement au foyer. La petite Zainab perd sa mère à l’âge de 7 ans.
Comme tout conte moderne, le père se remarie avec une marâtre, qui l’a maltraitée jour et nuit. Samia grandit, devient une belle jeune adolescente au sourire solaire, sa belle mère la promet à l’homme le plus riche du village qui a l’âge d’être son grand père.
La jeune fille prend son acte de naissance en main et défend sa vie devant le juge du village en refusant cette union, car elle n’a que 14 ans. Les mariages forcés étant interdits dans la religion musulmane, le juge ne peut qu’accepter la requête de la jeune fille. Zainab rentre alors chez elle, fière de son action. Mais pour la punir, sa belle mère la frappe tellement fort de rage qu’elle n’oubliera jamais cette sensation de mal-être, au point de la raconter dans chacune de ses interviews. La petite Zainab vit un enfer au quotidien et tient le coup pour son père. Quand celui-ci meurt subitement, il n’y a plus de raison de rester dans cette campagne rugueuse. La jeune femme a 15 ans quand elle quitte son village pour Le Caire, en prenant sous son aile sa demie-soeur.
Arrivées au Caire, les deux sœurs s’installent près du bazar Khan-al-Khalil. La jeune Zainab travaille alors pour une couturière dans cette mégalopole mythique. Au sein de ce petit atelier de couture, la radio est tout le temps allumée, et Zainab danse entre deux retouches devant le miroir sur les chansons de Farid El Atrache. Elle est séduite par sa voix, mais ne sait pas à quoi il ressemble.
Une des clientes l’aperçoit en train de danser dans cette boutique et lui propose de venir voir un film au cinéma. La jeune campagnarde découvre avec des yeux émerveillé les opérettes et le cinéma égyptien. Elle est complètement en admiration devant les danses de la célèbre Badia Masabni, danseuse et redoutable femme d’affaires syro-libanaise. Après cette séance au cinéma, elle décide de prendre son courage à deux mains pour rencontrer la star en se rendant au café Jamal où se trouvait tout le gotha cairote. C’est tout naturellement que Badia tombera sous le charme de cette jeune adolescente. Elle lui donnera son premier conseil : “Tu vas t’appeler Samia Gamal, car Zainab ça fait vendeuse de pop corn ».
Le mythe de Samia Gamal nait dans un cabaret du Caire, où elle va d’abord danser en figuration et sur des mouvements simples. Pendant qu’elle est sur scène, elle observe les solos de danses, elle sent que ses mouvements ont besoin de plus d’espace. Elle est surtout prête à danser seule ! Samia convainc Badia et quand ce fameux soir arrive, elle se retrouve au milieu de la scène, seule avec un projecteur braqué sur elle, tétanisée, impossible de bouger. Elle dira de ce solo : “J’étais incapable de repérer ma gauche de ma droite”.
Le public la hue, elle sort de scène en larmes et se promet de devenir la plus grande. Pendant un an, elle travaillera avec des grands chorégraphes, apprendra les danses du monde entier (classique, indienne, claquettes, rumba..). Elle se paiera même les cours d’Isaac Dickson pour travailler la fluidité de ses mouvements. À 20 ans, elle remonte sur scène avec des talons de 12 cm et danse comme si sa vie en dépendait ! Elle devient même la première danseuse charki à introduire les talons sur scène.
Samia Gamal signe avec la gloire, tout le Caire vient la voir danser. Le roi Farouk d’Egypte la consacre même comme étant “la plus grande danseuse du monde arabe”. Ses cachets explosent, et le cinéma lui fait les yeux doux. Elle fait d’abord de la figuration et continue à danser dans des endroits prestigieux. Alors qu’elle est dans le hall d’un grand Casino, elle prend un magazine en main, devant un kiosque à journaux. Elle demande au vendeur : “Excusez moi, qui est cet homme en couverture ?”. Une voix derrière elle lui répond alors : “C’est moi”.
Farid El Atrache en personne la regarde en souriant. Comme dans un film, elle s’évanouit et tombe sur le sol de ce casino. La suite va être une des plus belles histoire d’amour de tous les temps. Ce couple sera inséparable à l’écran comme à la ville, affichant leur amour. Il fera rêver et déplacer des foules entières dans les salles de cinéma. Farid lui écrira les plus belles chansons de son répertoire, comme “Habetek enta” (« c’est toi que j’aime”), “Mat oulch had” (“Ne le dis à personne”), « Habib al omr » (“L’amour de ma vie”), ou encore “Afrita Hanem” (“Madame la diablesse”).
Samia quant à elle, lui offre ses plus belles chorégraphies. Elle exige qu’on lui dessine les plus beaux costumes pour danser à ses côtés, elle lui offrira surtout son plus beau sourire à l’écran. Ces deux-là aimaient être ensemble et s’aimaient plus que tout. Ensemble, ils ont surtout révolutionné le cinéma égyptien par leurs productions musicales et leur photogénie qui crève l’écran, car ce couple était royalement beau. Un jour elle lui posera la question, avec son sourire légendaire :
“De toutes les chansons que tu as écrites pour moi, laquelle me représente le plus, Farid ? “ Il lui répondra ”Habibi Omr car tu es l’amour de ma vie”.
Samia aime sa vie, Farid et la danse mais elle veut officialiser les choses, elle exige le mariage. Farid refuse, il est persuadé que le mariage tue la créativité. Elle lui offrira un coran personnalisé à son nom, cadeau symbolique qui lui fait passer le message, et la mort dans l’âme elle rompt avec lui. Farid lui écrira les plus belles chansons de ruptures dans le répertoire arabe notamment « Banadi alik” (« Je t’appelle »), comme un cri du cœur qui dit à quel point sa bien aimée lui manque.
Mais Samia est loin, elle tourne en Europe « La vallée des Rois » en 1954 avec Robert Taylor et Eleanor Parker, puis ensuite une autre superproduction internationale « Ali Baba et les quarante voleurs » en 1954 de Jacques Becker avec Fernandel d’après le conte des Mille et une nuits.
En Egypte elle joue, en 1955 dans le célèbre film : « Un verre, une cigarette » (Sigara wel kass) de Niazi Mostafa. Elle y donne la réplique à une jeune actrice qui répond au doux prénom de Dalida, son premier rôle. Samia Gamal se marie finalement avec Sheppard King, un riche homme d’affaires texan, ayant fait fortune dans le pétrole, qui se convertie à l’islam pour elle. Il va surtout lui voler tout ses cachets d’artistes. Le mariage dure un an et Samia demande finalement le divorce.
Quelques années plus tard, elle va trouver un nouvel amour avec le beau Rushdy Abaza, un acteur égyptien (La mère de l’acteur Roshdy Zem a d’ailleurs appelé son fils ainsi en hommage à Rushdy Abaza). Rushdi et Samia vont tourner quelques films ensemble, mais lasse du monde médiatique, elle se consacrera d’avantage à la danse et à son mari. Elle donnera quelques spectacles rares et privilégiés. Rushdi, lui, va continuer sa carrière de beau gosse car il était diablement séduisant, et rencontre lors d’un tournage la chanteuse Sabah qui va le convaincre de répudier Samia, pour l’épouser elle…
Après 18 ans de mariage, Samia se retrouve seule, fatiguée, mais continue de sourire, aucun.e journaliste ne dira du mal de cette grande danseuse ! Malgré la violence familiale, un cœur brisé et des trahisons, toute sa vie Samia Gamal a été réputée pour son talent, sa gentillesse et son sourire légendaire. Cette femme, c’était un être de lumière.
En juillet 1974, lors d’une soirée mondaine au Caire, Samia apercoit Farid El Atrache au fond de la salle. Elle court vers lui, ils se prennent dans les bras l’un de l’autre, elle lui sourit et lui dit tendrement : “Tu es une part de moi”. Elle le trouve fatigué et triste.
– “Qu’as tu Farid ?”
– “Je sens que quelque chose de grave va m’arriver ! j’ai perdu le saint Coran que tu m’as offert »
– « Ne t’en fais pas, je t’en offrirai un autre »
-« Je garde ce Coran depuis les années 40, je l’ai toujours eu avec moi, le fait de l’avoir perdu est un mauvais signe”
Elle le prend dans ses bras pour le consoler.
Six mois plus tard Farid meurt de chagrin, et d’une profonde dépression.
Cette histoire avec Farid a duré à peine cinq ans et pourtant les journalistes, professionnel.les du spectacle, ainsi que le public lui ont parlé de cette idylle toute sa vie. Elle n’a pas juste vécu une grande histoire d’amour, elle a innové en matière de costumes, d’accessoires, de chorégraphies. Elle a influencé des milliers de danseurs.seuse dans le monde par la fluidité de ses gestes, la place qu’elle prenait sur scène, c’était juste majestueux, il faut l’a voir virevolter sur le morceau « Khodi Albi » , on dirait un oiseau qui s’envole. Elle avait ce sourire solaire qui illuminait le monde entier.
Samia Gamal meurt le 1 décembre 1994 au Caire. Le monde entier est touché par sa perte. En France, la cérémonie des Césars lui rendra hommage dans la liste des actrices disparues. Nous on espère qu’elle danse avec Farid dans un monde parallèle, et qu’elle ressent l’amour que l’on a pour elle.
[…] Farid El Atrache : Ya gamil […]
Très belle époque , où l’amour était romantique ,sublime! Ces acteurs de cette période ,nous ont bercés,fait rêver ! A ce jour,je regarde tjrs ces films en noirs et blancs qui me fascinent,m’inprègnent de leur mode de vie ,pleine de simplicités et de joies même dans les scènes de tristesse! C’est un moment de sérénité et d’apaisement que j’apprécie en revisionnant ces films qui ont une valeur historique pour le patrimoine égyptien et pour l’histoire du cinéma ! Je m’envole quand je les vois sur le petit écran…
Pareil je m’envole quand je les vois sur le petit écran, merci pour ce beau commentaire.
Merci ils ont révolutionner le Monde et personne ne pourra les remplacer ils resteront dans le coeur de millions de personnes.