Le musée du quai Branly, à Paris propose depuis Octobre une exposition assez ambitieuse d’un point de vue idéologique intitulée « The Color Line ». Elle pose la question de la place de l’art dans la lutte contre la Ségrégation et pour les droits civiques par les Afro-Américains. Depuis les lois dites « Jim Crow » jusqu’à nos jours, on retrouve donc plus d’un siècle et demi de lutte par l’art sous toutes ses formes.
Ce projet commençait mal, puisque le site Afropunk dénonçait dès son lancement plusieurs grossières erreurs, plutôt honteuses dans un livret pédagogique destiné aux enfants, comme notamment, que certains esclaves menaient des « vies agréables » et que les problèmes raciaux aux USA ont pris fin avec le mouvement des droits civiques.. La réponse a été assez rapide et les fameux livrés ont été retirés de la circulation…
Pour en revenir à l’exposition, elle est assez dense, très riche en contenu, longue et passionnante. Elle commence donc au lendemain de l’abolition de l’esclavage et suit l’évolution de la situation des noirs américains sur plus de deux siècles, au travers d’oeuvres d’artistes afro-américains, souvent méconnus ou même complètement oubliés. Tableaux, vidéos, gravures de presse, livres, photos, sont autant de supports pour rendre compte de l’horreur de ce racisme installé en vrai système. Quand tout est fait pour déshumaniser une population, la violence devient justifiée pour certains..
Une des premières utilisations de l’expression « Color line » ou ligne de démarcation est faite dans une déclaration de la première « Pan African Conference » à Londres en 1900 pour définir le problème majeur à traiter pour le siècle à venir. L’esclavage est aboli depuis plus de 30 ans mais la Ségrégation rend possible ce tracé indélébile, infranchissable, et source de violence. La lutte contre ce système n’a jamais cessée, et l’art a toujours été un vecteur primordial à cette lutte.
Malgré ce que laisse parfois penser l’exposition, cette ligne n’a pas miraculeusement disparue d’elle même après le mouvement des Civic Rights ou grâce à l’élection de Barack Obama. Une mention fugace au mouvement « Black Lives Matter » n’est clairement pas suffisant ..
En conclusion, c’est une très belle exposition, avec des moments parfois très durs (œuvres évoquant les lynchages par exemple), mais nécessaires au projet. Néanmoins, on a parfois une impression de naïveté, ou de mauvaise foi concernant la situation actuelle.
On attend maintenant le même genre d’exposition sur le racisme d’Etat en France depuis l’esclavage et la colonisation jusqu’à aujourd’hui. Il est toujours important de dénoncer les travers de ses voisins, alliés, mais si l’on est incapable de faire cette même introspection et remise en question de la politique coloniale en France, cela reste vain.
C’est d’ailleurs un sentiment partagé à la sortie de l’exposition par une visiteuse anonyme.
The Color Line au Muée du Quai Branly – Jacques Chirac, Paris
Du 04 octobre 2016 au 15 janvier 2017
Crédits photos : Nadialna
Très bon article , tout l’essence de cet expo bien retranscrit ! Yeah
Merci ! On a reussi notre pari alors!