[Interview] Noumane Rahouti, ou l’itinéraire d’un professeur aux 1001 facettes

Dialna - Noumane Rahouti

Il n’y a pas que les artistes qui peuvent servir de modèles inspirants pour Dialna. Des hommes et femmes du quotidien ayant, notamment fait l’expérience de l’exil à leur tour, après celui de leurs parents, mais dans des conditions totalement différentes en sont la preuve. Noumane Rahouti en est l’exemple.

Ce directeur de département d’Anglais à l’université de Floride centrale à Orlando est né à Montpellier et a grandi à Montluçon en Auvergne. Ce franco-marocain de 33 ans vit aux Etats-Unis depuis 2006 et parle couramment 4 langues : le Français, l’Anglais, l’Espagnol et le Berbère. Il a obtenu de nombreux diplômes dont un master en anglais, littératures et lettres à l’université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand, un master en psycholinguistique à l’université d’Oklahoma City et enfin un doctorat en philosophie/sociologie de l’éducation à l’université d’Oklahoma. Autant dire que son parcours scolaire est riche et diversifié. Noumane Rahouti a démarré sa carrière en tant qu’enseignant aux Etats-Unis alors qu’en parallèle il entamait son master dans une université américaine. Ce poste d’enseignant l’a d’ailleurs aidé à financer son master.

Par la suite, il a enseigné en Angleterre, en France, en Arabie Saoudite et dorénavant, il est de retour aux Etats-Unis. J’ai découvert un homme passionné et engagé qui participe à des conférences, partout dans le monde sur des thèmes tels que l’éducation, le racisme, l’inter-culturalisme ou la justice sociale. Il est également l’auteur de nombreux articles publiés sur différents médias web, mais aussi celui du livre La France des principes et la France des coutumes : L’avenir de l’Afro-Maghrébin dans la France du 21e siècle, publié aux éditions Les points sur les i en 2017. Dans cet ouvrage, il amorce une réflexion sur ce qu’il appelle « l’Afro-Maghrébin », c’est à dire celui ou celle né.e en France, et dont les parents sont nés au Maghreb ou en Afrique sub-saharienne. Il y parle de sa condition et de cette quasi schizophrénie liée à sa double culture. À cela s’ajoutent deux ouvrages en anglais (Optimal Language Learning et Crosslinguistic Study).

Son parcours et ses réalisations ont suscité l’intérêt de Dialna, c’est pourquoi nous avons décidé de l’interviewer.

Dialna : Ton parcours professionnel est plutôt inspirant. Qu’est-ce qui t’a donné l’envie de quitter la France pour t’installer aux États-Unis ?
Noumane Rahouti : Je suis de nature aventurière et j’aime tenter de nouvelles choses. Quand j’étais étudiant, j’ai eu l’opportunité de faire une année d’échange aux États-Unis. Une fois là-bas, je suis tombé amoureux du campus, de la vie à l’américaine, alors j’ai fait des pieds et des mains pour pouvoir y revenir.

D : Y-a t-il eu des choses qui t’ont choqué ou juste marqué à ton arrivée aux USA ?
N.R. : Ce qui m’a tout de suite marqué c’est la taille, les espaces, tout est démesurément plus grand qu’en France. Autre chose j’ai trouvé les gens très avenants, positifs, peut-être même trop ! Je me suis questionné sur les raisons de cette gentillesse. Je pensais que ça cachait quelque chose, alors qu’en réalité c’est juste comme ça qu’ils fonctionnent, c’est la mentalité américaine disons.

Dialna - Noumane Rahouti
Noumane Rahouti accompagné de ses étudiants à l’université d’Orlando

D : Quelle est la plus grosse différence que tu as noté entre la France et les USA ?
N.R. : En tant que français, d’origine marocaine et de confession musulmane, ce qui m’a surpris c’est la différence entre la culture anglo-saxonne et la culture française. L’Islam est traité différemment dans les médias américains, ce qui fait que je me sens moins stigmatisé aux Etats-Unis qu’en France. Ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas de racisme pour autant, ça veut dire que c’est différent. Je m’explique : le racisme là-bas est divisé entre plusieurs minorités (latinos, afro-américains, musulmans…), alors qu’en France le racisme est plus dirigé vers les noirs et les arabes musulmans. En cela je note l’une des plus grosses différentes.

Un enseignant imparfait

D : En faisant des recherches sur toi afin d’établir ton portrait, j’ai noté que tu étais un très bon danseur. Il t’arrive même de mettre au défi tes élèves qui ne se font pas prier pour enchainer les pas de danse. J’imagine que la danse est une discipline que tu pratiques depuis longtemps ?
N.R. : Oui (rires). Lorsque j’étais étudiant à Clermont Ferrand, je m’entrainais avec un groupe de Hip Hop et je portais déjà beaucoup d’intérêt à la culture américaine. La danse permet de se révéler, de sortir de sa bulle. Tu fais parfois des battles en un contre un alors il ne faut pas avoir peur de te tromper, de tomber… Clairement, pour moi, tout ça m’a aidé dans mon parcours.

La première chose à savoir quand on est professeur, c’est qu’il faut accepter l’imperfection
Noumane Rahouti

D : Qu’est-ce qui, d’après toi, est essentiel en terme de qualité pour faire un bon professeur ? Pour devenir celui qui parvient à transmettre un savoir, qu’on écoute et qu’on respecte ?
N.R. : La première chose à savoir quand on est professeur, et je m’adresse à tous les profs de France et du monde, c’est qu’il faut accepter l’imperfection. Souvent les profs ont peur d’avoir tord, de faire des erreurs. Moi dès que je me trompe je le dis, j’accepte l’imperfection, il faut accepter l’erreur. Je dirais même qu’il faut faire de l’erreur une richesse. Il faut encourager les étudiants à se tromper en leur expliquant que lorsqu’ils se trompent ils n’ont pas tord mais ils se rapprochent de la vérité. Deuxième chose il faut arrêter de croire qu’on est responsable de l’avenir de ces enfants. Je ne « mendie » pas l’attention des élèves et c’est aussi pour ça qu’ils me respectent. Troisième et dernière chose, il faut comprendre que la personnalité du professeur compte beaucoup. La mienne va bien avec celles des étudiants, car j’aime bien blaguer etc. De plus, étant donné que j’enseigne à des étudiants étrangers, je comprends d’où ils viennent et eux s’identifient à moi, car ils savent que j’étais à leur place il y a quelques années. Le fait que j’aime le foot, que je danse contribue aussi à créer une proximité entre nous. Je suis pour eux quelqu’un qui a fait des choses qu’eux mêmes aimeraient faire. Souvent ils me disent qu’ils me considèrent comme un grand frère, quelque part. Pour conclure, il faut être capable de comprendre nos étudiants et aller les chercher dans leurs centres d’intérêt.

D : Tu as enseigné au Royaume-Uni ainsi qu’en Arabie Saoudite. Qu’en as tu tiré ? Était-ce de bonnes expériences pour toi ?
N.R. : Les deux pays ont été de bonnes expériences mais si je les ai quittés, c’est que j’ai trouvé mieux ailleurs. Le Royaume-Uni, c’est très proche de la France donc inutile de s’étaler sur le sujet. La seule chose qui m’a vraiment ennuyé, c’est le climat… C’est d’ailleurs pour ça que j’ai visé la Floride, j’avais besoin de soleil et de lumière ! En revanche en ce qui concerne l’Arabie Saoudite, malgré les stéréotypes, ce que j’ai apprécié, c’est que c’est une culture collectiviste. Nous, nous avons l’habitude des cultures individualistes en France. Un exemple : même durant les examens (et malgré le fait évident qu’ils n’ont pas le droit) les étudiants s’entraident en Arabie Saoudite. Culturellement c’est considéré comme une honte de refuser d’aider quelqu’un.

D : Tu es souvent invité à échanger lors de conférences. Y’a t-il un ou des thèmes sur lesquels tu aimerais particulièrement débattre, apporter ton analyse, et si oui lesquels ?
N.R. : Un sujet qui m’intéresse particulièrement, c’est celui de ce que j’appelle les afro-maghrébins de France (enfants d’immigrés dont les parents sont issus de l’immigration africaine et nord africaine). D’une part parce que ça me concerne et d’autre part parce que ce sujet me passionne. La France a une histoire particulière et d’une certaine manière nous en sommes ses fruits. J’aime débattre sur le thème de la justice sociale en parlant spécifiquement de cette minorité là. Petit à petit, je prends position sur le sujet de l’éducation, car pour moi la solution à presque tous les problèmes, c’est l’accès à l’éducation. En France, il y a encore un narratif de l’intégration qui est accepté par toutes les branches de la population, aussi bien par la culture dominante que par les minorités. C’est à dire que certains continuent de penser que cette minorité n’est de toute façon pas tout à fait française alors que ceux issus des minorités s’accordent aussi à dire qu’ils ne sont pas totalement français. Je trouve qu’on se paralyse dans un débat qui ne mène nulle part, il me semble que c’est une perte de temps de toujours tourner autour de l’identité. D’ailleurs, les américains ne comprennent pas pourquoi en France on fait une fixation sur l’identité. Simplement parce que les Américains ne se focalisent pas sur ce qu’ils sont mais plutôt sur ce qu’ils font. Ce qui importe là-bas c’est ce que tu fais.

L’Afro-Maghrébin et sa condition

Ce n’est pas parce qu’on est une minorité qui émerge et s’émancipe intellectuellement qu’on doit exercer une relation de pouvoir sur ceux qui ne le sont pas encore.
Noumane Rahouti

D : Dans ton livre, tu parles de ce que tu appelles « l’Afro-Maghrébin ». Comment perçois-tu sa condition actuelle ? As-tu constaté une évolution depuis la publication de ton livre, il y au un peu plus de deux ans ?
N.R. : Sur le plan général, je ne constate aucune évolution parce que cette question liée à l’intégration on en parle depuis les années 90, donc presque 30 ans à subir un discours ou un sous-discours où on fait sous-entendre à cette minorité qu’elle n’est pas assez française, qu’il faut qu’elle change pour entrer dans les codes et les normes. À l’époque le problème c’était sa couleur de peau, son nom et son prénom. Maintenant c’est plutôt sa croyance.
Avant le « mauvais français » c’était celui en survet’ Lacoste, casquette etc, et aujourd’hui c’est celui qui porte une barbe, qui se ballade en kamis (long vêtement traditionnel porté par certains musulmans). On se sert de deux aspects différents pour effectuer le même processus d’exclusion de la sphère publique. C’est à dire qu’on ne souhaite pas les intégrer dans la sphère publique. A -t-on déjà vu une publicité avec des musulmans, avec une femme voilée par exemple ? C’est rare ! Je n’en ai jamais vu en France, peut-être qu’il y en a eu quelques unes mais ça reste un phénomène extrêmement rare.
Aux États-Unis, il n’y a aucun problème avec une femme voilée, un homme qui porte un turban etc. Les intégrer dans la sphère publique impliquerait que le reste de la population s’habituerait à eux et les accepterait et c’est pour ça qu’on refuse de les y intégrer. Pourquoi ? Je ne sais pas. Sans doute que diviser pour mieux régner est le mot d’ordre, ou bien parce qu’on cherche à nous détourner des vrais problèmes. Par contre l’évolution, je la vois au niveau du peuple. Aujourd’hui les minorités sont beaucoup plus instruites. C’est évidemment une bonne chose, mais j’aimerais mettre en garde les afro-maghrébins instruits. Attention à ne pas devenir arrogants à leur tour et ne pas dénigrer ceux qui n’ont pas réussi. Je me souviens d’un phénomène qu’on appelait la « beurgeoisie ». Ça consiste à rassembler des français d’origine arabe pour débattre de questions de société sans vraiment connaitre la banlieue à titre d’exemple, mais qui pourtant en parlent d’une manière hautaine et supérieure. Ce n’est pas parce qu’on est une minorité qui émerge et s’émancipe intellectuellement qu’on doit exercer une relation de pouvoir sur ceux qui ne le sont pas encore. Ce dont je m’aperçois aussi, c’est que certaines personnes se servent de l’Islam comme un bouclier identitaire. Je suis musulman moi-même et j’accorde beaucoup d’importance à la spiritualité mais il ne faut pas s’en servir pour exercer des relations de domination sur les autres. En gros, il y a une structure sociale qui tend à diviser et nous sommes les produits de cette structure sociale et on continue de diviser à notre niveau.

Dialna - Noumane Rahouti
Noumane Rahouti dans le cadre d’une interview au Bourget

D: Dans ton livre, tu décris également l’importance de la sémantique, est-ce que tu peux nous en dire plus ?
N.R. : La manière dont on parle est très importante, car c’est à travers la langue qu’on exprime des relations d’émancipation. Pour moi, la première étape de l’éducation, c’est la langue. Avant même de parler de justice sociale ou d’éducation, il faut parler de la langue. Manier la langue c’est manier les idées. C’est très important. Le combat du XXIème siècle est avant tout un combat linguistique. Il faut savoir s’exprimer sinon le moindre dérapage peut se retourner contre nous. Il faut également être en mesure de comprendre les mots que l’autre emploie pour être à son tour capable de lui répondre.

L’intégration, double peine

D : En France, on parle beaucoup d’efforts d’intégration à fournir, qu’on soit né en France ou pas, dès lors que les origines sont étrangères. Pour un natif, cela contribue souvent à creuser un fossé entre lui et le Français dit de souche. C’est aussi vieux que l’histoire de l’immigration elle-même et pourtant le problème perdure. Alors d’après toi, comment procéder pour parvenir à faire comprendre à l’ensemble de la société que plus on demande à Abdel, (né et scolarisé en France), de s’intégrer à la société française et de fournir plus d’efforts que n’importe quel autre français, plus, de facto, on contribue à l’ostraciser, à se sentir différent voire illégitime dans cette société qui l’a vu naitre ?
N.R. : A l’instant je t’expliquais l’importance de la langue, alors pour répondre à cette question je vais essayer de te l’expliquer d’un point de vue linguistique. Au niveau linguistique, on m’a dit « Noumane tu es un modèle d’intégration ». Ça veut dire que grâce à ma réussite je suis finalement enfin intégré, je suis finalement Français. Alors que si je n’avais pas réussi, je n’aurais pas été Français. Alors que pour Julien, dans un cas comme dans l’autre, il est et reste Français. En somme l’afro-maghrébin doit réussir pour être intégré dans la nation. Je suis né en France, j’y ai grandi mais je dois m’intégrer, je dois montrer patte blanche, passer un examen : celui de l’intégration. À travers ce langage de l’intégration, on a l’impression qu’il invite à réconcilier les gens, alors que non. Plus on demande à quelqu’un de s’intégrer, plus on lui fait comprendre que sa situation actuelle n’est pas assez bonne pour être Français. Plus on lui demande de s’intégrer, plus on l’exclue avec ce langage.

D : Depuis que tu vis aux USA, as-tu déjà vécu ou ressenti un racisme anti-français ou anti-maghrébin ?
N.R. : Anti-maghrébin non. Après je te dis la vérité c’est parce que les gens pensent que je suis latino ! D’ailleurs on m’a déjà traité de sale mexicain. Ça m’a quand même énervé, je me suis presque senti Mexicain ! Par contre, anti-français, oui. Le stéréotype du Français jamais content et arrogant, je l’ai vécu et subi. On m’a déjà dit « on en a marre des gens comme toi ».

Mes collègues trouvent ça extraordinaire que je parle berbère. J’ai ajouté cette langue sur mon CV qu’à partir du moment où je suis arrivé aux États-Unis.
Noumane Rahouti

D : As-tu rencontré des difficultés en arrivant aux Etats-Unis ? Si oui lesquelles ? Comment s’est passé ton intégration de manière générale ?
N.R. : J’ai rencontré des difficultés à cause de la barrière de la langue et aussi à cause de la différence de culture à laquelle il a fallu que je m’adapte. Ceci dit mon intégration a été facilitée car j’étais dans un contexte universitaire entouré d’autres étudiants internationaux. J’ai aussi utilisé le sport et la danse. Mon côté extraverti m’a également permis de faciliter mon intégration. C’est important d’aller vers les autres, et c’est notamment ce que j’apprends à mes étudiants, je leur explique que lorsqu’on apprend une langue il ne faut pas avoir peur de faire des fautes. Parler, échanger est la meilleure manière de s’améliorer.

D : Comment tes collègues américains perçoivent-ils ton parcours et quel oeil ont-ils sur ta double culture ?
N.R. : Ils perçoivent ma double culture comme une richesse, un plus. Ils apprécient le fait que je parle plusieurs langues dont le berbère ! Ils trouvent ça extraordinaire que je parle berbère. C’est très valorisé surtout parce que c’est une langue qui ne se parle presque plus. J’ai ajouté cette langue sur mon CV qu’à partir du moment où je suis arrivé aux États-Unis.

D : Quel(s) conseil(s) donnerais-tu à un français ou une française qui souhaite s’établir aux USA ?
N.R. : Je dirais qu’il faut réduire ses aprioris, qu’il faut foncer et tenter les choses. L’échec n’est pas une fatalité, c’est une étape nécessaire pour la réussite. Souvent, ce qui me revient comme question c’est, « Comment tu fais pour la sécurité sociale ? Comment tu payes tes études qui sont aux Etats-Unis hors de prix ? » Je pense que pour chaque problème il y a une solution ! Si je m’empêche d’aller aux USA parce qu’il n’y a pas de système de sécurité sociale comme en France, alors je n’ai rien à faire là-bas, car seuls les gens qui prennent des risques obtiennent des récompenses. D’ailleurs la plupart des Français que je connais et qui sont établis là-bas sont ceux qui sont sorti de leur confort et pris ce risque.

Dialna - Noumane Rahouti
Noumane Rahouti en pleine séance de dédicace au salon du livre à Paris

D : Comment, des États-Unis, perçois-tu le climat politique d’une part et général d’autre part en France ?
N.R. : Honnêtement parfois, je n’y crois pas… Je me dis qu’ils font une fixation, que ça devient maladif. Les questions sur comment une femme doit se vêtir à la plage, à la piscine, sur son droit d’accompagner des enfants en sortie scolaire alors qu’elle porte un voile sont incompréhensibles. Quand j’en parle à mes collègues américains, ils hallucinent ! Ils sont étonnés qu’on se prenne la tête sur ça, ils se demandent aussi si on n’a pas de plus gros problèmes à régler. Pour eux, c’est totalement aberrant.

D:  Envisages-tu de revenir un jour t’établir en France ?
N.R. : Oui bien sûr, car ce pays reste mon « chez moi » et me manque beaucoup. D’ailleurs, j’y pense de plus en plus. Si j’avais les mêmes opportunités professionnelles en France qu’aux Etats-Unis, je serais en France sans même hésiter un instant.

D : Qu’est-ce qui te manque le plus en France, et au contraire le moins ?
N.R. : Ce qui me manque le plus ce sont des choses toutes simples, comme prendre mon café en terrasse avec mes potes, avaler un bon croissant, la vie à la française quoi ! En revanche ce qui me manque le moins c’est le côté grincheux des gens…

D : Il me semble que tu es quelqu’un de plutôt engagé. As-tu déjà pensé à embrasser une carrière politique ? Et/ou associative ?
N.R. : Si j’étais en France, oui, peut-être. Il faudrait y réfléchir… Pour information j’étais engagé dans une association pour les étudiants internationaux latinos aux Etats-Unis (rires).

D : Ton avenir semble radieux mais comment l’envisages-tu ? Qu’est-ce que je peux te souhaiter pour la suite ?
N.R. : Tu peux me souhaiter de me rapprocher des bonnes choses et de m’écarter des mauvaises. J’ai été promu Directeur de département, à 33 ans, ce qui est très jeune aux Etats-Unis et quasiment impossible en France. Pour l’instant je fais mes armes et je verrai par la suite ce que je vais faire.

D : Est-ce qu’il y a une personne ou une personnalité en particulier, homme ou femme, qui t’inspire, te motive ?
N.R. : Mon père, parce que je suis conscient des grandes choses qu’il a accomplies avec le peu de moyen dont il disposait. Avec un salaire de smicard, il nous faisait vivre (famille de 3 enfants), nous emmenait au Maroc chaque année, parvenait à mettre en sécurité ses parents en leur construisant une maison et faisait vivre son frère et sa famille. Si lui a réussi à faire tout ça, je me dis que je ne devrais pas avoir peur de perdre mon boulot. Tout est une question de savoir tirer le maximum du peu de ressource qu’on a. Et ma mère bien sûr ! C’est elle qui faisait en sorte que la maison tourne. C’est aussi elle qui me réveillait tous les matins avec douceur et qui insistait pour porter mon sac à dos sur les 4 km de marche qui nous séparait de l’école…

D :  Je te laisse le mot de la fin !
N.R. : Quoiqu’il arrive, plus on multiplie les expériences plus on grandit. Quelle que soit les expériences, bonnes ou mauvaises. Il faut tout de même être conscient des sacrifices que l’on va faire. Ce qui me fait du mal depuis que je suis aux Etats-Unis, donc depuis 13 ans, c’est que j’ai raté toutes les naissances de mes neveux et nièces, c’est de savoir que mes parents prennent de l’âge, d’avoir été loin quand mes grands parents sont décédés… Tout ça contribue à me questionner sur mon avenir ici. Je sais que ce que je fais est bien, mais j’ai raté des choses importantes, donc petit à petit je travaille à l’élaboration d’un plan pour rentrer en France.

 

Fatine El Asri

 

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